Pablo Moses - New Morning - 25 janvier 2011

Je connaissais de Pablo Moses les productions estampillées 70’s : Révolutionary Dream et Pave the Way (sa superbe pochette dessiné) que j’aime beaucoup, et un live non officiel enregistré dans les années 80 qui dégueule de synthé cheap, daté et franchement énervant. C’est donc avec un a priori plutôt négatif que je me rendais au New Morning, et surtout pour accompagner "High-Tek" Bellek avec qui on cherchait depuis plusieurs mois une date de concert à se faire.

Je ne fais pas durer le suspense, le concert étais super et le synthé, bien que relativement présent, l’était dans des proportions tout à fait acceptables.

Embusqués dans le bar en face du New Morning on est parmi les premiers à entrer dans la salle. On se trouve une place confortable contre la scène. Quarante cinq minutes après l’horaire indiqué sur les billets les musiciens entrent sur scène ce sont le Revolutionary Dream Band. Sur un riddim roots, l’organisateur de la soirée présente les musiciens. Il nous répète trois fois que ce sont des musiciens From Jamaica ! Certifié. Avant d’introduire Pablo Moses.

C’est un monsieur d’un certain âge, mais vif, qui entre en scène, sautillant, dread locks jusqu’au milieu du dos, jolie barbe. Il nous dit qu’il est très content d’être à Paris ce soir et que c’est la première date de la tournée de son dernier album The Rebirth.

Pablo Moses est entouré de deux claviers, et derrière lui guitare, batterie et basse s’entassent sur la petite scène du New Morning. Sur les premiers morceaux j’anticipe un excès de synthé, mais ça ne viens pas, les sonorités ne sont pas trop datées et elles sont utilisées avec brio. Ils se repartissent les taches : un est plutôt à la rythmique, au skank, l’autre joue avec les ambiances et des nappes bourrées d’écho, ça sonne très reggae dub, parfois il se saisit d’un saxophone.

La voix de Pablo Moses est celle que l’on attend d’un vieux rasta : un peut éraillée mais bien posée. Il la met au service de lyrics conscients, allant piocher dans tout son répertoire. Des premiers albums au dernier.

Bad Boy basé sur une comptine enfantine « Bas boy, bad boy, Johnny is a bad boy ». Un refrain entêtant et un message contre l’usage des drogues dures. Mama Yeah, une chanson du dernier album parle de l’Afrique, berceau de la culture Jamaïcaine, dans un style influencé par le reggae africain. Ready Aim Fire, dans un style très reggae dub, et Pablo Moses qui mime une exécution, un hymne antimilitariste. Rasta à la gloire du mouvement rasta et qui dénonce les discriminations faites aux rastas tout comme la dérive du mouvement dénaturé par certains. « Rasta no gimmick ». Spirit of Jah et d’autres chansons typiquement root reggae inspirées des prières rasta à Jah Rastafari aussi connu comme Hailé Sélassié 1er , dernier empereur éthiopien et messie du mouvement rastafari.

Une belle soirée donc, un voyage immobile vers la Caraïbe et l’île de Jamaïque dont l’influence culturelle ne cesse de rayonner à travers sa musique.
 

Godspeed You! Black Emperor - Grande Halle de La Villette - 14 janvier 2011

On s’est précipité pour acheter nos places quand on a appris qu’ils repassaient à Paris après 8 ans de silence discographique aussi bien que scénique. Ils n’ont pas chômé pour autant, travaillant sur différents side projects comme celui de Elfrim( leader-gourou de Godspeed You! Black Emperor) et d’une poignée de musiciens plus ou moins reliés eux aussi à Godspeed You! Black Emperor: Silver Mt Zion Memorial Orchestra.

Trêve de nostalgie, le concert de ce soir se déroule dans une salle que je ne connais pas, la Grande Halle de La Villette. Pour être grande, ça, elle est grande, bien plus grande que ce que j’avais imaginé. Heureusement on arrive suffisamment tôt pour ne pas être trop loin de la scène.

En première partie, un DJ, dont on ne nous a pas donné le nom (Total Life d'après la blogoboule), joue avec des boucles minimales, bruitistes. Des drones qu’on dit en anglais. Bourdons en français. Pas le genre de DJ qui vous de demande de lever les mains et de jumper… Il part en laissant un bourdonnement grave sur scène, un son qui prend aux tripes. Un peut comme le bruit marron, mais qui en plus vous vrille les oreilles. Le supplice à duré vingt bonnes minutes, le temps du changement de scène.

Les membres de Godspeed You! Black Emperor entrent sur scène les uns après les autres, débonnaires, ils donnent l’impression de ne pas s’apercevoir de notre présence et de ne pas trop savoir non plus ce qu’ils foutent là. Ils commencent à jouer chacun dans leur coin, à l’unisson du drone qui sature l’air de la salle immense à l’acoustique douteuse. Encore vingt minutes à ce régime et 1) mon sphincter est tout à fait détendu 2) je saigne des oreilles 3) je me demande si j’ai bien fait de ne pas me renseigner avant de venir sur les performances des Godspeed You! Black Emperor sur les dates précédentes de cette tournée. Est-ce qu’ils font ça pour se foutre de nous ? On a fait quelque chose de mal ? Est-ce que leur nouveau style est basé sur une sorte de happening pendant lequel on fait se chier dessus les spectateurs ?

Et puis petit à petit des modulations dans les vibrations du bourdon se font ressentir, imperceptibles au début. Puis une strate rythmique semble nous parvenir. J’ai un net regain d’intérêt pour ce qui se passe sur scène quand le morceau Gathering Storm semble s’extraire et naitre du fléau sonore d’une trentaine de minutes que je viens de vivre.

La scène est plongée dans une demi peine ombre, les musiciens y vont et viennent au fil des mouvements des morceaux sur lesquels ils interviennent. Un des deux batteurs passera une bonne partie du début du concert à se promener entre la scène et les coulisses un verre de bière à la main… Derrière eux sont projetés des images, extraites de films super 8, textes, schémas, distrayant un peut l’œil du spectateur. Sur ce morceau un train qui passe cent fois sur la toile, sur celui-ci un chien qui n’en fini pas de boitiller au milieu d’extraits in-identifiés de notes gouvernementales nord-américaines. L’effet est plutôt réussi et se marie bien avec les ambiances musicales du groupe.
De gauche à droite se trouvent Mike Oya et Efrim Menuck assis sur des chaises, cote à cote, tous les deux à la guitare, sur les intro des morceaux Efrim place des cassettes sur lesquelles sont enregistrées des discours en anglais et en low-fi dans un petit lecteur. Bruce Cawdron et Aidan Girt sont on fond de scène, tout les deux à la batterie, ils font trembler la salle quand ils se mettent à jouer ensemble sur un crescendo. Ils sont coincés entre les amplis des autres musiciens. Devant eux Mauro Pezzente est à la basse, secondé par Thierry Amar à la basse lui aussi, parfois à la contrebasse. Sophie est toute petite devant son énorme ampli pour son violon. Et enfin David Bryant est assis devant, dos au public, de temps en temps il vient au milieu de la scène lancer une boucle ou jouer sur un xylophone.

Je suis emporté par les longues envolées héroïques de leurs musiques, les passages ou le morceau semble être fini et il reste un instrument qui relance la machine dans une furie encore plus grande que ce que l’on vient de vivre. Oui, on VIE la musique de Godspeed You! Black Emperor. Dans ces moment là je trépigne, j’essaye d’onduler, parfois de bouger la tête en rythme ou bien quand je ne tiens plus c’est tout le buste qui oscille en rythme pendant une mesure. Mais pas plus, la salle est bondé, je comprends a l’air morose de mes voisins qu’ils ne sont pas là pour danser le pogo. Des crampes me montent dans les mollets.

Je suis enchanté par les moments plus calmes, le violon et la contrebasse grincent de manière inquiétante comme dans la BO d’un film d’horreur tandis que les guitares jouent les deux même notes pour faire monter la tension. Je sens mes dents qui grincent, crispé par l’émotion oppressante de la musique. Mes pieds s’ancrent au sol, j’essaye de me retenir au plancher de la salle, emporté par les changements de rythmes. Des crampes me montent dans les cuisses

Les morceaux sont constitués de plusieurs mouvements, ils « n’en finissent pas de finir », alternant moments calmes et longues envolées bruyantes. Vous savez dans un concert de rock « normal », à la fin d’un morceau quand les musiciens changent de mode sur le dernier accord ou la dernière mesure et que vous avez la sensation que le morceau est effectivement fini après ça… Chez Godspeed You! Black Emperor ce moment extraordinaire est provoqué encore et encore. Tous les instruments s’y mettent les uns après les autres. Ça me colle des frissons à chaque fois. Le concert à durera deux heures trente. Des crampes me montent dans les fesses.

Ce fut donc un super concert, avec une musique époustouflante, mais aussi un moment éprouvant physiquement. Pourquoi imposer la station verticale à un public immobile ? Nous sommes rentré en marchant sur une bonne partie du chemin, histoire de se dérouiller les jambons après les avoir mis a rude épreuve.

Le concert est en écoute et en téléchargement intégral en version haute qualité (flac 96khz) grace à archive.org. Un grand merci au taper également. Conseil : passez les deux premiers morceaux...

Merlot - Z.E.P. - Ivry, Le Hangar - 4 décembre 2010

Arrivé un peut à la bourre, je n’ai pas entendu le discours de soutiens aux sans papiers. La soirée s'intitulait Le Père Noël n’a pas de papiers. Je me précipite au bar, juste à temps pour avoir la moustache dans la mousse de ma bière quand le concert de Merlot commence.

Merlot

Ça fait deux fois en six mois que je vois le père Merlot. La dernière fois, je découvrais, j’avais emmené mon gamin. Cette foi-ci la salle est envahie des gamins des autres ! Merlot à un nouveau spectacle. Toujours plus loin dans le second degré, le chanteur de Baobab en échappée solo laisse libre cour à sa nature ultra capitaliste mode « tout pour ma gueule » : photo de Carla et Sarko, Sardou, Bill Gates et de dollars bricolés à l’effigie de Merlot sont projetés en fond de scène. Le chanteur arrive, en toute simplicité, costume et manteau de vison jeté négligemment sur les épaules, une manière de montrer les vraies valeurs de la France à la banlieue rouge.
Par contre les baskets montantes bleues et rouges cassent un peut le mythe.

Sur Hello, un air de jazz suranné, Merlot invite une touriste américaine « to visit the real neuf-trois », et à manger chez « a little restaurant called la fontaine à frites, you’ll try the little sauce samouraï, speciality from Ile de France »

Plus tard il arme des gamines du premier rang d’armes de guerre gonflables et les faits montés sur la scène pour illustrer une proposition de loi alléchante : autoriser le port d’arme pour les femmes. « Si ton petit copain te trompe, ton beau père veut te tripoter ou ton patron te sauter, CASSE LUI LA GUEULE ».

Il salue le public d’immigrés et d’islamo gauchistes. Sa grande silhouette dégingandée parcourt la scène en chaloupant. Pour les rappels il joue des titres de son précédant spectacle, plus hip-hop. « Ah ça, les classes populaires ça aime bien le tchak-poum… Espèce de dégénérés ! » A force de cris et d’applaudissements, on le fait revenir pour un second rappel, il joue à nouveau Hello.

Z.E.P.

Z.E.P. pour Zone d’Expression Populaire, émule du M.A.P., Ministère des Affaires Populaires. Saïd, MC du MAP s’entoure de Alee à la guitare, d’une derbouka, une batterie et un accordéon. Le tout donne un mélange rap, chanson, musette, dans la lignée de MAP ou Zebda par exemple.

Saïd commence le concert en expliquant sa posture : « ZEP prône l’insolence et l’irrévérence et hurle à qui veut l’entendre et à qui ne le veut pas : On n’est pas là pour plaire, séduire ou convaincre ».

Chaque texte est un brulot contre la bêtise, le paternalisme postcolonial envers les noirs et les arabes en France. Saïd demande si il a l’air « bien intégré » si son « français est correcte ». « OUIII » répond plein d’enthousiasme un mec du public, et c’est vrai que si le mec sur scène dit un truc, grosso modo tu hurle OUIII et ça passe. Mais là « connard » lui rétorque Saïd du tac au tac. L’idée c’est de ne pas avoir à se justifier, à justifier sa présence ou à prouver son amour de la France quand on est descendant d’immigré. De ne pas avoir à être jugé a priori sur sa maitrise de la langue française et recevoir des encouragements qui ne seraient pas donné à un autre. C’est pour cela qu’ils ont appelé leur album Devoir d’Insolence, car il est insolent aujourd’hui d’être immigré et de prendre parti. Que ce soit politiquement, philosophiquement, religieusement et surtout individuellement.

Il y a aussi des chansons sur la Palestine, l’identité, la famille, sur la difficulté à se positionner comme artiste, comme saltimbanque (une thématique aussi développée par Merlot). Saïd parcoure la scène en rappant, il prend parfois des poses assez rock’n’roll, un pied sur le retour, micro tendu quand le publique reprend les refrains. Chanson, énergie rock, flow hip-hop, engagement politique, cajón, derbouka et guitare sèche, ce mélange fait penser au bouillonnement de groupe du début des années 90, fin 80 comme les Negresses Vertes, Los Carayos,… On imagine Z.E.P. aussi a l’aise dans une grande salle que dans un petit bar.

Et v’là Saïdou qui sort de scène en laissant son groupe tout seul ! Alee, le guitariste est aussi chanteur il nous chante la difficulté à se positionner comme troubadour (c'est-à-dire un mec qui voudrais devenir saltimbanque...). Il nous joue trois ou quatre chansons, son répertoire est plus « chanson » que celui de Saïd-le-rappeur. Son accent, la tessiture de voix, l’accompagnement à l’accordéon… Même les thèmes abordés entre réalisme, rêveries et engagement… Tout, sauf le physique, me fait penser à François Hadji-Lazaro. Du Pigalle.

Saïd reviens pour quelques titres dont N.L.F. acronyme pour Nique La France. "Nique la France et son passé colonialiste, ses odeurs, ses relents et ses réflexes paternalistes, nique la France et son histoire impérialiste, ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes"
Il y a un livre aussi, qui porte le même nom : Nique La France. Avec 70 photos d’anonymes qui posent le majeur levé face à l’objectif, et un essai de Saïd Bouamama. Une analyse des mécanismes qui mènent à un racisme acceptable, et appel à l’insolence.

Pas de rappels, mais Saïd nous attend à la sortie pour discuter, serrer des mains et vendre le livre qu’il nous à présenté. Avec le livre il y à un disque. Douze chansons de Saïd et Alee qui sont également téléchargeables sur le site de ZEP.

Casey - Bataclan - 14 décembre 2010

En première partie Casey à invité Blankok la Dream Team, un groupe de Blanc Mesnil. C’était un peut brouillon a mon goût. Beaucoup de mecs sur scène, peut qui y faisait quelque chose. Beaucoup filmaient ou frimaient avec leurs potes. Ensuite, pendant une bonne grosse demi-heure, DJ Fab et DJ Kozi, de Génération FM (88.2 à Paris) on fait un mix spécial trentenaire : Public Enemy, Assassin, Busta Flex,… Ça me rappel le car en colonie de vacances. Pendant les premières parties, Casey parcourt la salle de long en large, salue tout le monde, détendue elle prend la température de la salle.
 
Quand elle arrive enfin sur scène, t-shirt Origines Contrôlés sur le dos, le public est super chaud. On sent tout de suite que le niveau est nettement supérieur à ce qui c’est passé en première partie. Le public réagis super bien. Les supporter du Blanc Mesnil bien sur, mais aussi le public classique d’un concert parisien, qui se laisse facilement convaincre par l’énergie énorme que dégage la rappeuse. Casey est accompagné de B.James sur tous les morceaux. Ils sont compagnons de micro depuis un bon bout de temps et ont créé leur propre crew Anfalsh. Le DJ envoie des instrus froides : batterie électro, une mélodie minimale qui laisse de l'espace au flow de Casey. Le flow de Casey, lui, est incisif, précis, efficace et très rythmé, mais toujours intelligible malgré le son plutôt moyen de la salle.
La diction est une des préoccupations de Casey dans sa façon de rapper. Elle en parle sur Apprend à T’Taire « Ta diction dépasse le stade de l’inadmissible / Arrête les messages, illisibles au portable ». Ce morceau est un exercice de style jouissif dans lequel elle s’en prend à tout ce qu’il y a de plus inaudible dans ce qui est étiqueté rap sur le premier couplet, à ce qu’il y a de plus mièvre dans ce qui est étiqueté r’n’b sur le deuxième couplet (« Je l’aime, il m’aime et il m’a conté fleurette dans les pâquerettes »), et à ce qu’il y a de plus vendu dans ce qui est étiqueté chanson sur le troisième couplet. Une perle !
 
Elle pousse le rap dans ses retranchements, ou plutôt le prend par la main pour en faire à nouveau une musique de révolte. Les morceaux rapés ce soir par Casey sont tirés de ses deux premier albums ainsi que ce celui enregistré avec Zone Libre. Ils ont pour thème la négritude, l'esclavage (Un Sac de Sucre), la banlieue (Dans Nos Histoires), le racisme provincial, l’argent (une grande méfiance pour l’argent), la violence (Le Fusil dans l'Étui) et toujours une noirceur glauque et poisseuse, un pessimisme désespéré.
 
Le rap comme musique de révolte et une vision du monde a travers les paupières d’un déprimé chronique, c’est un univers que Casey partage avec une petite poignée d’autres rappeurs en France. Parmi ceux-ci Rocé que Casey et B James invitent pour Si Peut Comprennent. Un featuring d’anthologie !
Rayon featuring on a été servis. AL du label Matière Première est venu posé avec brio. Plus tard c'est Hamé de La Rumeur qui rejoins Casey et B James.
 
Avant de revenir pour les rappel Casey vanne : « on en fait deux trois dernière et on rentre … Quoi vous allez pas rester à écouter du rap glauque et dépressif toute la nuit!?»
 
ps : dédicace à high-tech Béleck qui a hérité d'une place en trop.
pps : Un nouvel album de Casey & B.James vs Zone Libre Viens de sortir. C'est Les Contes du Chao.
ppps : un film viens de sortir dans lequel on peut voir des musiciens comme Casey, Zone Libre, D' de Kabal, Berurier Noir, Marc Perrone, ... J'aime quand les genres musicaux sont confrontés les uns aux autres comme ça! Ça s'appelle 93 la Belle Rebelle
 
 

EZ3kiel vs Hint - La Machine - 28 janvier 2011

Arofarn et moi étions impatients de voir ou revoir EZ3kiel vs Hint. Après le concert de 2009, après la sortie du CD/DVD de la tournée.

A la Machine du Moulin Rouge (ex Loco) il y a deux salles : la Chaufferie au sous sol et le Central où aura lieu le concert de EZ3kiel vs Hint.
La Chaufferie, petite salle en sous sol, un décor industriel qui nous a un peut rappeler le boulot et des éclairages au néon de couleur vives pour un effet vampiro-urbain a la True Blood. On aperçoit encore en dessous un décor en carton pâte qui fait penser au dessin animé Beetlejuice. C'est très kitch. Heureusement on est bien entouré, le public à l'air sympa.

Lonesome Bulldog

On descend donc à la chaufferie, on est accueillis par Lonesome Bulldog qui commence juste son set. C'est un one man band minimaliste. Guitare saturée, grosse caisse et charley aux pieds, il chante en anglais. C'est du rock bien bourrin, je me surprends à rentrer tout de suite dans son univers.
Arnaud de Hint est lui aussi ébahis par la prestation de Lonesome Bulldog, arriver à faire tout ce bruit tout seul est un défit.
Les 30 minutes de son set me semblent très courtes.

Zëro

Nettement plus mélodique que Lonesome Bulldog, Zëro doivent une bonne part du caractère de leur rock bidouillé est dut aux bidouillages de leur clavier. Il joue entre autre sur un vieux moog décoré avec un gros autocollant "shit happens". Je ne crois pas qu'on l'ai vu lever les yeux de son clavier une seule fois de tout le set.
Le son daté du moog renvoie aux années 70, au psychédélisme, aux expérimentations de Captain Beefheart. On peut aussi penser au free jazz, mais l'énergie dégagée par le groupe est tout ce qu'il y a de plus rock.
Le chanteur tiens aussi la basse, et ça c'est la classe, c'est comme Mark Sandman de Morphine. Au delà de l'anecdotique il y a un petit air de ressemblance entre les deux groupes, surtout de l'approche jazzy d'un rock pourtant bien présent dans leur musique. Le minimalisme et la sensation d'urgence perceptible à l'écoute des deux formations me fait faire ce rapprochement. En tout cas c'est aussi une belle découverte.

On continue à s'alcooliser avant de monter se trouver une place pour le concert événement de la soirée.

EZ3kiel vs Hint

En faisant le tour par le coté de la salle on se trouve une bonne place pas trop loin de la scène.
Comme on est au Moulin Rouge ils passent Colette Renard avant le lever de rideau. Une chanson inoubliable du Pigalle de la grande époque.
EZ3kiel et Hint ne sont pas venu avec le fond de scène métallique qu'ils avaient sur la tournée précédente, mais ils ont conservé leur mise en scène improbable avec les deux batteurs en hauteur, surplombant un impressionnant mur d'amplis.
Le premier morceau 100% White puzzle commence lentement puis vas crescendo. Yann Nguema joue à l'archet sur sa basse. Dans mon délire ça me fait comme si je voyais Jimmy Page. Faut dire qu'il a du charisme Yann, campé sur ses deux pieds, le regard vers le fond de la salle, impassible faisant vrombir des cordes de basse plus grosses que mes doigts. Arnaud de Hint (et La Phaze, faut-il le rappeler?) joue de la trompette et du saxo sur ce morceau... Ou plutôt les faits hurler comme le font les groupes de free jazz. On devrait appeler ça comme ça EZ3kiel vs Hint, du free rock ! Les deux percussionnistes font sonner de petites clochettes et un glockenspiel, font des vocalises diphonique à la manière des chanteurs mongoles donnant une consistance éthérée à cette introduction. Tout à coup ils envoient le gros son. Les guitares hurlent et se répondent, la basse nous frappe en plein bide.
Je suis agréablement surpris qu'un pogo se mette en place devant la scène. je les rejoins pour sauter sans retenue et partager de violents, mais néanmoins amicaux, coups d'épaules avec mes voisins, dans une bonne humeur qui n'a d'égale que la noirceur de la musique des deux groupes qui combinent leurs efforts.
Je me retrouve au pied de la scène, aux pieds des musiciens. Prévenant j'amortis avec le dos les pogoteurs qui se projettent contre la scène en suivant des yeux les changements de guitare, les échanges discrets entre les musiciens.
Je perds le fil de mes souvenir, je me souviens vaguement d'un Versus déstructuré mais terriblement efficace, reconnaissable à quelques samples de voix. Quelques bribes de Volfoni's Revenge me reviennent a l'esprit. Les stroboscopes faisaient flamboyer le sax d'Arnaud au bord de la scène tandis qu'il maltraitait ses guitares à grand coups de moulinets.
Hervé, l'autre membre de Hint se crispe sur sa guitare, il hurle de temps en temps dans le micro, se plie en quatre et s'enroule autour de sa guitare.



Marvin

Pas le temps de reposer nos oreilles, dans la salle du bas le concert commence déjà. La fille que l'on avais vu jouer la groupie devant Zëro s'avère tenir les claviers dans le groupe Marvin. Ils envoient du bois. Un son sale et saturé, entre punk et éléctro. Le chanteur passe son temps à hurler. Comme on le comprend, ça doit pas être évident de se faire entendre par dessus la batterie furieuse, la basse puissante et saturée, et les riff de guitare tranchants comme un solo de métal millésimé 80's, le tout noyé dans des nappes de clavier grinçantes.
On a vu un mec slamer tout prés de la machinerie et de ses tuyaux.
je serais bien resté à découvrir, mais commençais déjà le set de Scorn



Scorn

A force d'écouter des groupes lorgner vers l'éléctro il était inévitable que l'on tombe en plein dedans avant la fin de la soirée. Le DJ set de Scorn est incroyable. Il nous fait voyager par des contrées urbaines inexplorées a coup de drones lancinants. Les rythmes hypnotiques oscillent entre indus, dubstep (dont Scorn est l'un des précurseurs) et rythmes complètement déstructurés. On danse au milieu d'une salle à peine plus vide que pour le concert de EZ3kiel et Hint. Pourtant on se sent seul, perdu au milieu de l'univers oppressant de Mick Harris. Il est capable de vous faire ressentir un malaise désagréablement confortable comme pendant une sombre dépression en utilisant un couple de bourdons, une caisse claire et une ligne de basse martyrisée.

On est partis voir si Pierre Carré chantais au Noctambules, mais comme il y avait des reprises de Michael Jackson on est rentré chez nous.

Echo Doppler - Kaly Live dub - Ivry, le Hangar - 29 janvier 2011

J'en ai assez de dire du bien de cette salle! Je passe directement à mes impressions du concert.

Echo Doppler

C'est un groupe à la moyenne d'age très basse qui entre en scène, visiblement pas mal impressionné, a moins que ce soit un style qu'ils se donnent : "on se précipite tous sur nos instruments tête baissée". Mais dés que tout le monde est en place et commence à joué je suis époustouflé par la maturité de leur musique. Ils ont sut se nourrir de toute cette scène française de dub instrumentale.
C'est une scène que certains n'ont pas hésité à déclarer morte après le virage rock éléctro de Zenzile, celui plus indus de EZ3kiel, la mort de Manutension d'Improvisators Dub. Pourtant la voici, toute fraiche, prête à évoluer encore, déjà pleine des influences de ses ainés.
Les mecs d'Echo Doppler ont une insolente maitrise des ambiances. Sur une basse lourde qui vrille la boîte a ragout et les breaks de batterie finement ciselés les trois autres membres du groupe posent samples, nappes et lignes de claviers pour les une et riffs de guitare pour le dernier. Debout au milieu de la scène, le guitariste m'a époustouflé, passant de la rythmique à des riffs mélodiques, voir franchement psychédéliques (comme sur Dubther), il arrivait à tirer le meilleur d'un équipement rudimentaire en comparaison à ce que l'on peut voir aux pieds d'autres guitaristes.
Une bien belle mise en jambe donc, qui à fait l'unanimité.

Kaly Live Dub

Après un rapide changement de plateau (Echo Doppler jouaient sur le matos de Kaly Live Dub), entre le crew Kaly Live Dub. Je ne sais pas comment j'ai réussis à les voir aussi peut souvent alors que je les écoute autant. C'est une succession de rendez-vous manquez, de flegmes, de concerts programmés dans des salles trop grandes, bref j'attends ce concert avec impatience.
Ils ne saluent pas, foncent sur leurs instruments tête baissée (un style qu'ils se donnent !).
Leur formation est la même qu'Echo Doppler : guitare, basse, batterie, claviers et machines-effets sonores. Uzul est au centre de la scène, caché derrière ses machines. Un choix un peut étrange puisqu'il est cache pour la moitié de la salle et cache la moitié de ses copains pour l'autre partie de la salle.
Je suis tout de suite envouté par les ambiances sombres et lourdes que Kaly Live Dub ont explorées sur leur dernier album. Les morceaux plus anciens sont passés à la même moulinette, je n'en reconnais aucuns, si ce n'est quelques samples réutilisés ici ou là. De disques en disques la musique de Kali live Dub à évoluée, ils ont aussi fait évolué leurs anciens morceaux afin de donner de la cohérence à leur set.
Les featuring de l'album sont remplacés par des samples. En temps normal, je crie au secours, mais avec Uzul au contrôle, ça fonctionne bien, il cisaille les voix leur donnent de la couleur, les maltraite à coup d'effets et de filtres.
Le public réagis bien et skank en rythme.

Après le concert d'EZ3kiel hier, et celui de Pablo Moses mercredi on pourrait penser que je suis rassasié d'infra basses et de breaks de batteries, mais non... J'espère que la programmation des concerts pour la fin de l'hiver et le printemps va me gâter!