Che Sudaka - Hangar, Ivry - 4 juin 2010

Un an après leur concert aux Solidays, j’ai hâte de les voir dans la salle du Hangar, une de mes salles préférées sur Paris.

La première partie est assurée par La Scaña Del Domingo. La dernière fois que j’avais vu ce combo parisien, c’était vers 2002 dans un bar qui s’appelait l’Imprévus ou un truc comme ça, tout petit rade, le trombone s'emmêlais dans le sax qui foutais les pieds dans la batterie et le mec au banjo qui manquais de crever un œil a quelqu’un a chaque fois qu’il sautais… et il a passé la soirée à rebondir !
Je les retrouve ce soir après qu’ils aient sortis trois albums. Leur musique est toujours estampillée « Festif de merde ». C'est-à-dire un peut de ska, une touche de Balkan, une jolie rasade de rock bruyant. Des paroles sombres, un peut loufoques. Une grosse patate et un esprit décalé. Une bien bonne mise-en-jambe, donc.

Toute la salle est dehors à profiter de la tombée de la nuit. J’ai l’oreille !! On se radine à l’intérieur dés que la musique d’ambiance s’arrête. Barboiron me fait remarquer que les musiciens de Che Sudaka ont un trac fou… Ils s’accordent devant une salle vide. Les deux chanteurs, Leo et Kachafaz, se regardent en serrant les dents ; le guitariste se refait l’intro du premier morceau, guitare débranché ; le clavier se frappe la poitrine en sautillant sur place. Il a l’air de trembler un peut, il sert les dents lui aussi.

Dés les premiers accords, la salle se remplie d’un public réceptif et bienveillant. Le dernier album est resté longtemps disponible en téléchargement légale et gratuit sur le site internet du groupe. Du coup beaucoup de monde connais les paroles.

Un joyeux pogo se met en place entre les 20 plus nerveux des premiers rangs (j’en suis). Les deux chanteurs de Che Sudaka sautent dans tout les sens, les morceaux s’enchainent, les rythmes changent plusieurs fois pendant un même morceau. On passe ainsi du rock au ska au rap à des riffs métal ou à une cumbia sabrosa (délicieuse, la cumbia est forcément délicieuse !).  Comme pendant les concerts de Manu Chao. Gambeat le bassiste de la Radio Bemba de Manu Chao à coaché Che Sudaka avant cette tournée.

Il y a beaucoup de titres du dernier album, Tudo é Possible (Seras Feliz, risa Bonita, Mentira Politiko,…), et beaucoup de titres de leur premier album aussi (Alerta Bihotza, Taliban, Bam*Bam,…)

Ils calment le jeu quelques minutes avec « Sin Papeles », une adaptation de « Englishman In New York » de Sting dédiée aux travailleurs sans papiers qui se sont fait expulsés des marches de l’Opéra Bastille la veille. Suit une Cumbia épicée métal servie par Sergio à l’accordéon.
Pour les rappels, ils mettent encore plus d’énergie. Leo le chanteur chauve qui grimace se fout à poil et fini le concert en slip. Dans la salle le pogo est rendu mal aisé par une couche de bière et de sueur mêlée au sol… ça glisse énormément.
Saluts, applaudissements. Les Che Sudaka distribuent des autocollants à tout le monde et vendent leurs cd et t-shirts à des prix modiques à même la scène. On se presse pour les leur acheter, leur serrer la main et les remercier d’avoir fait la route jusqu’à Ivry.

SMOD - Vieux Léon - 3 juin 2010

Je lis une revue politique, en buvant un demi de bière hors de prix, assourdis par une musique trop forte, en plein milieu du quartier branchouille des Halles (j’aime pas dire bobo, au moins les bobos font l’effort de ne pas être des beaufs).
Je m’aperçois à peine que je commence à fredonner l’air qui passe. Je me retourne… C’est SMOD qui à déjà commencé à jouer, à moins d’un mètre de moi.
 
« Ça chante, ça rap »
 
SMOD c’est un peut les chouchous de ce blog puisque c’est grâce à la chronique que j’ai fait de leur concert l’année dernière au French K-wa que j’ai gagné le concours qui m’a envoyé aux Solidays tout frais payés en 2009.
Ça fait un an que j’attends la sortie de leur album (plus même… Manu Chao en parlais dés la sortie de « Dimanche à Bamako », l’album de Amadou et Mariam, en 2004). J’ai collecté les titres mis en ligne sur leur myspace, téléchargé le EP Digital, j’ai même mis la main sur un CD promo destiné aux radios du titre « Ça chante » !
 
Je connaissais presque par cœur les chansons jouées ce soir. C’est qu’elles sont hyper efficaces ! Tu les entends une fois, elles te restent dans la tête.
 
« Jouez moi cette guitare comme il faut / J’ai des problèmes qui tournent dans ma tête »
 
On est une trentaine à écouter Sam, Ousco et Dousky chanter. Ce soir ils sont accompagnés de Manu (pas LE manu, un autre...) aux claviers et boite à rythme. Dehors, Paris met à jour son profil facebook sur son e-pad. On s’en fiche.
« Politik Amagni » La politique, ce n’est pas bon.
Ils reprennent le titre d’Amadou et Mariam, les parents de Sam. Manu Chao à produit l’album des parents, maintenant celui du fiston. C’est la mifa, la famille.
 
« Ambola »

On est ensemble, même si on est que 30 à écouter SMOD ce soir, on est chauds, ça danse, c’est vivant, très respectueux du groupe. Le set est court, bien travaillé. Taillé pour les scènes des grands festivals de cet été (la tournée a été annulée l'année dernière a cause d'une histoire de visa). Il n’y a pas de raison pour qu’ils ne cartonnent pas.
 
« J’ai pas peur du micro / J’anime le show/ Avec mon flow »
 
Joie, ils sont venus avec des exemplaires de leur CD. Enfin, je le tiens entre mes mains. Je savais que l’enregistrement se trainais quelque part : sur l’ordi de Manu Chao, chez une maison de disque, dans un studio pour le mastering… Ils attendaient le bon moment pour le sortir. Je me le fait dédicacer par les 3 rappeurs. Merci à SMOD.
Ambola

Mahmoud Ahmed, Alèmayèhu Eshèté – CC Paul Bailliart, Massy – 31 mai 2010

Avec Needa Sheikh on avait raté le concert de Mahmoud Ahmed quelques mois plus tôt à Paris. Sur un coup de tête il a deux places pour ce concert à Massy, même si c’est très loin là-bas, dans la banlieue sud et qu’il va falloir prendre la voiture.
Coup de flip en arrivant dans la salle quand on s’aperçoit qu’elle est toute petite et pleine à craquer alors qu’on à glander dans le hall en mangeant des crêpes pendant une demis heure. Heureusement on se trouve deux sièges bien placés.
Les billets annonçaient Éthiopiques avec Mahmoud Ahmed et Alèmayèhu Eshèté. Éthiopiques c’est le Badume’s Band, un collectif monté après, et en hommage aux rééditions d’albums mythiques d’éthio-jazz des années 60 aux années 2000 sorties chez Buda Musique à partir de 1998 (23 volumes a ce jour). C’est donc un tribute-band de français, (de bretons !!!), à ce genre musical. Ils ont leur propre chanteur, Eric.

C’est lui qui entame les festivités, un blanc, roux, avec un look de prof de fac : Pantalon marron, veste à manches trop longues et collier de barbe… et ça marche. Je suis pas du tout spécialiste en amharique, mais ça n’a pas l’air de sonner faux.
Après 2/3 morceaux (c’est-a-dire 25 minutes… Les morceaux d’éthio-jazz sont souvent très longs, étirés au maximum jusqu’à atteindre un point de rupture, et même alors, ça continue, on reprend la ligne mélodique et on prolonge la transe dans un second souffle)… Après deux ou trois morceaux donc Eric laisse sa place à Alèmayèhu Eshèté. Applaudissements nourris du public. Et là, grosse frayeur dans la salle, on n’entend pas du tout la voix. On est frustrés car il joue son tube « Addis Abeba Behete ». A la fin du morceau, on lui change son micro. Ouf, ça fonctionne mieux. Sa voix est puissante, haut perchée, elle ressemble un peut a celle des crooneurs égyptiens. En le voyant bouger, je me dis qu’il fait penser à un Little Richard ! Ils ont a peut prés le même âge.
  
Après quelques morceaux il laisse humblement et respectueusement la place à Mahmoud Ahmed. Tonnerre d’applaudissements. Les musiciens sont toujours les mêmes. Eux, ils restent, les chanteurs changent. Il y a 3 cuivres, guitare, batterie, percus, basse, claviers.
Mahmoud Ahmed fait beaucoup plus vieux qu’Alèmayèhu Eshèté. Il est habillé tout en blanc, dans une tenue qui rappel une tenue traditionnelle. Quelques motifs vert-rouge-or pour rappeler les couleurs de l’Éthiopie sur son épaule droite.
Sa voix est magnifique, envoutante. Même si on l’entend dérailler sur les premiers morceaux. Pas de quoi bouder son plaisir d’écouter  un maître chanter cependant.
Les premières chansons sont très mélancoliques (« Ere Mela Mela »), on devine grâce aux gestes qu’il fait qu’il chante la mémoire, le départ et l’amour perdu (il se touche le front, le cœur à deux mains et tend le bras comme pour retenir tendrement un proche qui s’en vas). Plus le concert avance, plus la mélancolie fait place à de la joie et à la fête. Et Mahmoud Ahmed nous la fait sacrément partager !

La diaspora Ethiopienne se presse pour danser devant la scène, à droite. Pratiquement toutes les femmes sont habillées de rouge. A gauche, des femmes d’un âge respectable envoient des œillades appuyées à Alèmayèhu Eshèté qui est revenu pour chanter avec son compatriote, sa chemise est déboutonnée jusqu’au milieu de la poitrine.
Devant moi 5 jeunes femmes très banlieue sud : robe à fleures, petit nœud en soie dans les cheveux, tapent dans leurs mains et ondulent des épaules en imitant Mahmoud Ahmed. Une vague d’énergie musicale et festive traverse la salle et rebondie entre la scène et le public.
Eric reviens accompagner Mahmoud Ahmed et Alèmayèhu Eshèté. Il a l’air très impressionné, il est plein de respect pour les maîtres avec lesquels il partage la scène.

Déluge d’applaudissements, pour les rappels, personne de souhaite déjà quitter la si agréable chaleur de la transe provoquée par la musique. C’est un grand moment de bonheur partagé. Tous les musiciens reviennent sur scène, la salle reste debout pour onduler en rythme sur les mélodies entêtantes.
Quand les lumières se rallument, on reste longtemps debout à applaudir en espérant qu’ils reviennent. Musique d’ambiance. Un technicien sur scène les bras levés en croix. C’est fini. Bousculade vers la sortie. Arrêt au stand merchandising…
Mais ! Ces pulsations, cette mélodie ? On cour de nouveau dans la salle… Ils sont tous de nouveau sur scène… Quelle ambiance magique ! Quelle générosité. Le public est super réceptif. Ils réinterprètent « Addis Abeba Behete », hymne à la capitale Ethiopienne, qui avait été jouée plus tôt…
C’est le cœur gonflé de ce sentiment entre joie et nostalgie inspiré par la musique du Badume’s Band, Alèmayèhu Eshèté et Mahmoud Ahmed que nous traversons paris, en voiture, la nuit.